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Les droits des paysan·nes à l’ordre du jour de l’ONU

Cet article a initialement été publié sur les sites de La Via Campesina et du CETIM le 3 octobre 2022.

Dans le cadre de la 51e session du Conseil des droits de l’homme, une délégation de La Via Campesina (LVC), soutenue par ses alliés historiques CETIM et FIAN International, s’est rendue à Genève pour continuer le travail de plaidoyer en faveur de la promotion de la Déclaration sur les droits des paysan·nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (DDP).

Rappelons que la crise multidimensionnelle à laquelle nos sociétés sont confrontées – en particulier la crise alimentaire – représente un défi systémique et non conjoncturel. De fait, des solutions concrètes, capables de générer des changements substantiels et structurels, sont nécessaires. En ce sens, la DDP, si elle est correctement mise en œuvre et répond aux demandes du mouvement paysan, constitue un outil important ainsi qu’un levier juridique et politique au service des luttes paysannes.

Depuis l’adoption de la DDP en 2018, LVC et ses alliés se mobilisent à tous les niveaux pour plaider en faveur de la mise en œuvre de cet instrument. Ceci afin que les droits qui y sont inscrits deviennent une réalité pour les communautés rurales. La mobilisation se fait également au niveau des espaces multilatéraux internationaux où LVC et ses alliés demandent notamment la création d’un mécanisme de suivi des droits des paysan·nes, sous la forme d’une Procédure spéciale du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.

Le mardi 27 septembre 2022, Zainal Arifin Fuat, membre du comité de coordination international de La Via Campesina et du syndicat paysan Serikat Petani Indonesia (SPI), est intervenu en plénière du Conseil lors du Panel sur le droit au travail en relation avec la crise climatique actuelle. Le représentant de LVC a expliqué comment la crise climatique actuelle affecte de plus en plus les zones rurales. Il a également rappelé que l’augmentation et l’aggravation des désastres climatiques affecte sérieusement les conditions de vie et le droit au travail des paysan·nes.

De plus, Zainal Arifin Fuat a souligné que le mouvement paysan a toujours été capable de construire des systèmes alimentaires résilients aux aléas climatiques, contrairement à ceux issus de l’agriculture industrielle. Les articles 13 (droit au travail) et 22 (sécurité sociale) de la DDP établissent l’obligation pour les États d’adopter des mesures appropriées afin de promouvoir des systèmes alimentaires durables, garantissant le droit au travail et à la sécurité sociale des paysan·nes en cas de désastres climatiques.

Le jeudi 29 septembre 2022, Diego Montón, du Movimiento Nacional Campesino Indigena (MNCI Somos Tierra-Argentina) et membre du Comité de coordination des organisations rurales d’Amérique Latine (CLOC), est intervenu lors du débat sur les organes et mécanismes de l’ONU. Le représentant paysan argentin a expliqué que, durant la crise de Covid 19, aucun progrès significatif n’avait été réalisé, mais qu’au contraire, dans certaines régions, les violations des droits des paysan·nes avaient augmenté. Ces difficultés découlent d’une part de la crise climatique et de l’autre, des activités nocives de l’agrobusiness et de la spéculation alimentaire. Face à ces défis, Diego Montón appelle le Conseil des droits de l’homme ainsi que tous les États membres de l’ONU à unir leurs efforts pour avancer dans la mise en œuvre de la Déclaration, en particulier par la création d’un mécanisme de suivi sur les droits des paysan·nes au sein du système onusien des droits humains1.

Diego Montón a conclu ainsi son intervention : « Nous espérons que nous pourrons parcourir ce chemin ensemble afin que les paysan·nes du monde entier puissent exercer pleinement leurs droits et que la sécurité et la souveraineté alimentaires deviennent une réalité mondiale ».

Soulignons encore que, le 20 septembre 2022, toujours dans le cadre de la session du Conseil des droits de l’homme, la Mission Permanente de l’État Plurinational de Bolivie, conjointement avec les représentations permanentes de Cuba et de l’Afrique du Sud, a fait une intervention lors de la séance plénière du Conseil. La représentante bolivienne a souligné l’importance de la Déclaration comme une étape historique dans la protection des droits d’une population vivant dans une situation de grande vulnérabilité dans le contexte des crises actuelles. L’Ambassadrice de l’État Plurinational de Bolivie a insisté sur le fait qu’il est nécessaire de redoubler d’efforts pour mettre en œuvre les droits des paysan·nes à travers un dialogue constructif ainsi qu’une coopération entre les États et les détenteur·trices de ces droits.

Dans cet état d’esprit, LVC et ses alliés vont continuer à collaborer de façon constructive avec les États susmentionnés ainsi que tous les autres afin de générer des synergies et un large soutien pour la promotion et la mise en œuvre de DDP partout dans le monde.

Globalisons la lutte, globalisons l’espoir !

Les droits des paysan·nes, c’est maintenant !

  1. Une fois réalisé, le mécanisme de suivi aura les fonctions suivantes : i) être un forum de discussion et de coopération entre les pays, un espace d’échange de bonnes pratiques, de coordination d’idées et de propositions de mise en œuvre entre les pays. En même temps, le mécanisme permettra un dialogue direct et une articulation entre les représentant·es des pays, les détenteur·trices de ces droits (paysan·nes et autres communautés rurales) et d’autres organisations de la société civile travaillant sur la promotion de la DDP ; ii) contribuer à l’élaboration de rapports pour suivre la situation des droits des paysan·nes dans différents pays ; iii) promouvoir l’élaboration de politiques et l’analyse de législations nationales en ce qui concerne la protection des droits des paysan·nes, conformément au contenu de la Déclaration ; et iv) élaborer des recommandations concrètes pour les pays sur la façon de mieux mettre en œuvre les droits des paysan·nes.

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